Victor Herbert s’est éteint le 26 mai 1924, à New York, à l’âge de 65 ans. Il souffrait depuis quelque temps de problèmes cardiaques, une condition qui avait limité son activité ces dernières années. Malgré ces difficultés, il était resté actif dans le monde du théâtre et de la musique jusqu’à la fin.

Sa disparition marqua la fin d’une époque pour Broadway et l’opérette américaine. Herbert avait été l’un des piliers du théâtre musical au tournant du siècle, un orchestrateur de génie, un compositeur prolifique, et un chef d’orchestre charismatique. Il avait écrit plus de 40 opérettes et d'innombrables morceaux orchestraux, influençant profondément la transition entre l’opérette européenne et la comédie musicale américaine moderne.

Victor Herbert fut un compositeur de transition, unissant la tradition européenne de l’opérette aux prémices de la comédie musicale moderne. Sa disparition marqua le crépuscule d’une époque, alors que Broadway s’orientait vers le jazz, les revues modernes et les comédies musicales au format plus fluide. Aujourd’hui, son influence reste indéniable, et son nom figure toujours parmi les fondateurs du musical américain.

 

Victor Herbert laissa un testament détaillé, mais sans instructions sur la disposition de ses restes. Sa mort soudaine bouleversa son épouse Theresa, laissant à leur fille Ella la responsabilité des décisions funéraires. Les obsèques furent organisées à St. Thomas' Church, un choix naturel étant donné qu'Herbert était anglican et que l’église possédait une forte tradition musicale. Il fut temporairement inhumé au Woodlawn Cemetery, aux côtés de nombreuses figures du monde artistique et théâtral.

Cependant, peu après les funérailles, l’ASCAP réalisa un masque mortuaire et un moulage de sa main, retardant son inhumation définitive. Ce n’est que le 10 juin 1925, après un an en crypte, qu’il fut déposé dans son mausolée. Son masque et sa main moulée furent d’abord conservés à l’ASCAP, puis transférés en 1926 à la Library of Congress, sous la garde d’Edward Waters, son futur biographe.

Herbert avait un jour plaisanté en disant qu’il rédigerait un "testament irlandais" affirmant avoir dépensé tout son argent. Une remarque qui, au final, n'était pas si éloignée de la réalité.

Le testament de Victor Herbert attribua 10 000 dollars à son fils Clifford, mais sans droit sur les revenus des droits d’auteur, estimant qu’il avait déjà bénéficié d’une éducation privilégiée à Lawrenceville, Princeton et Cornell. En revanche, sa fille Ella, qui n’avait pas eu les mêmes opportunités, nourrit un profond ressentiment envers son frère, qu’elle voyait comme le favori des parents.

Malgré ces privilèges, la vie de Clifford fut loin d’être un modèle de stabilité. Élevé en fils de riche gâté, il eut une carrière chaotique, travaillant successivement comme ingénieur chez Ford à Chicago et Berlin, courtier en bourse, conseiller technique pour le cinéma notamment sur des films inspirés des œuvres de son père (Babes in Toyland avec Laurel et Hardy), explorateur pétrolier en Louisiane, éleveur de bétail au Texas.

Côté personnel, Clifford se maria trois fois:

  • Une mondaine de Troy (Michigan), qui s’enfuit lors de leur lune de miel à Paris en menaçant de se suicider
  • Une actrice du New Jersey, ambitieuse et attirée par le théâtre
  • Une jeune femme, qui lui survécut malgré son mode de vie excentrique, entre affaires menées depuis un café en Louisiane et une tentative d’élevage bovin à El Paso

Il finit par mourir à El Paso, le 1er janvier 1961, et fut enterré au Forest Lawn Cemetery à Hollywood Hills, parmi d’autres célébrités. Son dernier acte marquant fut de léguer ses revenus ASCAP aux Boy Scouts de Pasadena, un choix qui aggrava son conflit avec Ella. Déjà très stricte et conservatrice, elle voyait en lui bien plus qu’un simple contraste de mode de vie.

Leur querelle avait atteint son point culminant lorsque Clifford encaissa en secret des obligations appartenant à leur père, les négociant à Paris sans prévenir Ella. Ce geste, bien que légal, fut perçu comme une trahison par sa sœur. Dès lors, ils ne se parlèrent plus que pour des affaires.

Malgré cette rancune, Ella fit le voyage jusqu'à Hollywood pour assister aux funérailles de son frère.