Le film de Steven Spielberg retourne aux sources du musical tout en gommant les aspects qui, aujourd’hui, ne sont plus acceptables. Le casting des Sharks est entièrement constitué d’acteurs et d’actrices d’origine latinx. Les personnages portoricains sont en général plus développés, plus sympathiques et leurs motivations sont mieux expliquées. Bernardo par exemple devient un boxeur qui se bat pour protéger son quartier car la police ne le fait pas. On apprend aussi le nom de famille de Maria et Bernardo (Vasquez).
Une partie des dialogues est en espagnol et sans sous-titres car, comme l’explique Spielberg, « Si j’avais sous-titré l’espagnol, j’aurais simplement doublé la présence de la langue anglaise, et donné à l’anglais le pouvoir sur l’espagnol. Je devais respecter suffisamment la langue [espagnole] pour ne pas la sous-titrer.»
Même si les créateurs originaux du musical sont sensibles à la situation défavorisée des Sharks (et des minorités en général), la majorité du musical se voit du point de vue des Jets ce qui en fait les « héros ». Le film est plus nuancé : on voit les Jets vandaliser des commerçants hispaniques qui n’ont rien à voir avec une guerre de gangs, Riff est plus toxique et plus brisé intérieurement qu’il ne l’était. Un drapeau portoricain est saccagé par les Jets : aujourd’hui ce serait considéré comme un crime de haine et cela donne une raison aux Sharks d’engager la première bagarre du film.
Le racisme du lieutenant Schrank est également dirigé contre les Jets qu’il appelle « les fils des Blancs qui n’ont pas réussi ».
Plusieurs membres des Jets sont également développés par l’ajout de dialogues qui en expliquent le passé : on apprend par exemple que Tony sort d’une année de prison pour avoir presque tué le membre d’un autre gang. Son séjour derrière les barreaux lui a donné le temps de réfléchir et de mûrir. Anybodys, de « garçon manqué », devient transgenre et son interprète est non-binaire.
Doc, quant à lui, est remplacé par Valentina, sa veuve portoricaine. Interprétée par Rita Moreno (qui jouait Anita dans le film de 1961), elle chante la chanson Somewhere à la place d’une voix anonyme de fille comme dans le musical ou de Tony et Maria comme dans le film de 1961. Dans la dernière scène du film, on la voit accompagner Chino qui n’attend plus seul d’être arrêté par la police.
Un personnage afro-américain nommé Abe a été ajouté afin de refléter, selon Spielberg, la diversité ethnique du New York des années 1950.
Cool, America et Maria retrouvent leurs places originales dans la narration. Seul Gee, officer Krupke reste dans la première partie et n’a plus lieu dans une allée mais à l’intérieur du poste de police.
Plusieurs emplacements sont nouveaux : One Hand, One Heart se déroule dans le musée des Cloîtres au nord de Manhattan et non plus dans la boutique de mariée où travaillait Maria dans le musical. Maria est employée dans le grand magasin Gimbels où elle chante I feel pretty (auparavant chanté dans sa chambre). La bagarre n’a plus lieu sous l’autoroute mais dans un entrepôt de sel. La rencontre de Tony et Maria n’a plus lieu au milieu de la piste de danse mais, pour des raisons de réalisme, dans un endroit un peu plus discret dans le gymnase.
Juste avant que Tony ne meurt, les amoureux chantent une phrase de Tonight et non plus de Somewhere, un ultime retour au musical où les amoureux et Spielberg décident de célébrer une dernière fois leur amour plutôt que leurs rêves.