4.
1866 - «The Black Crook», première création américaine

 5.5.
Victor Herbert

 5.6.E.
1919: la grève de l'Actors' Equity

 5.6.G.
1930-1942: une légende avant tout

 5.7.
Irving Berlin (1)

 6.
1927 - «Show Boat»

F) 1920-1930: le déclin et la chute

F.1) 1920 - Un nouveau monde...

Au début de 1920, Broadway vit la fin d'une collaboration qu'elle avait tant aimée: Cohan & Harris. Peu après l’ouverture de The Acquittal () le 5 janvier 1920, Cohan & Harris ont annoncé au monde entier qu’ils suivraient dorénavant chacun leurs propres chemins. Nous ne pouvons que spéculer sur les raisons pour lesquelles l’événement s’est produit, car ni l’un ni l’autre ne fera jamais aucune déclaration officielle. Mais une des raisons difficielemnt contestatble doit avoir été que Sam Harris a décider de céder aux revendications de l'Actors' à Equity pour mettre fin à la grève de 1919 (). Harris a dû se rendre compte, en signant l'accord entre la Producing Managers’ Association et l’Actors' Equity, que les producteurs n’avaient vraiment pas d'autre choix. Ils devaient céder aux demandes d’Equity, sinon ils risquaient de perdre des artistes talentueux au profit d’autres producteurs qui eux se soumettraient aux règles d'Equity. en dehors de leur cercle. De plus, chaque nuit, Broadway était «dark», fermé, et aucun argent ne rentrait dans les caisses des producteurs. Un mois après le début de la grève, la pression devenait rop forte et Harris a du revenir à la dure réalité et signer. Cela a créé une faille avec son partenaire de quinze ans. George M. Cohan avait combattu avec acharnement Equity et en avait amèrement voulu à la Producing Managers’ Association d'avoir finalement cédé. Pourtant, personne ne connaît la vérité de la situation. Si la fin du partenariat était vraiment due à la concession de la Producing Managers’ Association à Equity, alors pourquoi Cohan & Harris a-t-elle attendu près de quatre mois avant d’annoncer leur décision ? Et, après qu’il l'eurent annoncé, pourquoi ne pas en expliquer publiquement les raisons?

Alors que The Acquittal () rencontrait un succès mitigé et qu'il disposait de quelques millions de dollars à la banque, Cohan annonça une fois encore sa retraite. Cette fois-ci, elle a duré huit mois, et quand il est revenu, il a ouvert trois succès à partir de septembre 1920.

F.2) Automne 1920 - Un flop et trois succès

Le 6 septembre a eu lieu la première de la pièce de théâtre Genius and the Crowd () (1920 - 24 représentations) qui sera un terrible flop au George M. Cohan's Theatre, Cohan n'était que producteur de ce spectacle.

Trois semaines plus tard, le 27 septembre, Cohan a proposé une nouvelle pièce de théâtre qu'il a cette fois co-écrite avec Cora Dick Gantt, The Tavern () (1920 - 252 représentations), une fois encore au George M. Cohan's Theatre. Certaines critiques furent mitigées, mais cela n'a pas empêché que la pièce soit un vrai succès à Broaddway avant de partir en tournée.

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A rare original 1920 program for the legendary George M Cohan in «The Tavern» at the Tremont Theatre, Boston (Try-out)

The Tavern () était la pièce préférée de George M. Cohan, et il l’a reprises à plusieurs occasions (notamment avec des productions en 1921 et 1930) en jouant dans ce cas le rôle principal du Vagabond lui-même. En 1940, il a écrit une suite, The Return of the Vagabond () ans laquelle il a joué (une dernière fois) accompagné d'une nouvelle recrue à Broadway: Celeste Holm. Ce spectacle ne tiendra l'affiche que 7 malheureuses représentations... The Tavern () se déroule par une nuit orageuse, alors qu'un mystérieux voyageur, le Vagabond, entre dans la vie d’un petit groupe de personnes. Au cours de la soirée, un meurtre se produit, et chaque groupe de personnes tente de le résoudre. Ce personnage du Vagabond a beaucoup inspiré Cohan au cours des deux décennies qui allaient suivre. Basé sur la pièce de Cora Dick Gantt The Choice Of A Super-Man, cette création a sorti Cohan d’une autre retraite auto-imposée après sa lutte avec l'Actors Equity. Le caractère de Vagabond reflétait le mépris croissant de Cohan pour cette profession qu’il a si longtemps dominée alors qu'aujourd'hui la plupart de ses pairs le considèrent comme un paria social. Les psychanalistes pourraient dire qu'il était à la recherche de son «moi» perdu).

Signalons encore que lors de la création, le rôle du Vagabond était joué par Arnold Daly dont la plus grande contribution au théâtre avait été d’importer aux Etats-Unis les œuvres de George Bernard Shaw. Il a joué dans les productions américaines originales de Candida et Man & Superman en 1905. Le faire jouer le Vagabond The Tavern () était un choix parfait même si ce dernier s'est lassé de son rôle comme s'en souvient Cohan:

« Arnold Daly vint vers moi et me dit:
  • - ' George, quand aurons-nous un changement de distribution ? '
  • - ' Que veux-tu dire, un changement de distribution ? Ce spectacle va se jouer plus d'un an ' ai-je répliqué.
  • - ' Pas avec moi, j'en ai marre. ' répliqua-t-il
  • - ' Ne sois pas stupide. Si c’est une augmentation que tu veux, nous sommes des amis, demande-la. '
  • - ' J’en ai assez du rôle. Je vais jouer Ibsen et Shaw le mercredi en matinée au Comedy Theatre. ' m'a-t-il répondu.
Et c'est ce qu'il a fait... »

George M. Cohan


A nouveau trois semaines plus tard, le 12 octobre, la pièce de théâtre The Meanest Man in the World () (1920 - 202 représentations) est créée à l'Hudson Theatre. Cette pièce d’Augustin MacHugh - mais fortement «cohanisée» - s’est avérée extrêmement populaire auprès du public. Elle raconte l'histoire d’un avocat qui se rend dans une petite ville et sauve un habitant de sa ruine financière. En cours de série, George M. Cohan a repris le rôle principal, ce qui fut très populaire. Deux adaptation cinématographique seront faite au départ de la pièce: la première en 1923, un film muet de Edward F. Cline et en 1943, un film de Sidney Lanfield.

Le 18 octobre 1920, 6 jours après The Meanest Man in the World (), vint un troisième succès intitulé Mary () (1920 - 220 représentations) joué au Knickerbocker Theatre. Encore une fois, Cohan a «cohanisé» l’œuvre d’un autre, mais cette fois il s'agissait d'un musical. Mary () a été très populaire auprès du public dans tout le pays, et sa chanson The Love Nest a été un tube comme on dira plus tard. balayé la nation.

Les trois spectacles se sont joués simultanément et ont tenu l'affiche un an. Même s'il était considéré par la profession comme un traître, même s'il avait rompu avec Harris, on ne peut pas dire que le retour de Cohan se soit mal passé. Mais on n'allait pas tarder à être sur la pente descendante...

F.3) 1921-1922 : les derniers vrais succès

Le 4 avril 1924, il créa à l'Hudson Theatre la pièce de théâtre d'Augustus Thomas Mary () (1921 - 51 représentations). Il perdit de l'argent. Cela a conduit à Cohan à jouer un peu plus la sécurité et il décidda de produire un autre musical de l’équipe qui avait écrit Mary (). Ce musical s’appelait The O'Brien Girl () (1921 - 164 représentations) et a ouvert le 3 octobre 1921 au Liberty Theatre de Broadway. Elle s’avéra aussi populaire que Mary (), mais la formule d’écriture théâtrale utilisée commençait à devenir trop évidente pour les critiques.

En janvier 1922, George M. Cohan est réélu à l’unanimité et retourne à la Producing Managers’ Association. Il poursuit ses attaques contre l’Actors' Equity comme le montre la lettre ci-dessous:

"To The Members Of The Acting Profession"
Don't let them tell you the Equity shop is not a "closed shop." Don't let them trick you into something down deep in your hearts, you know you don't want to crush out all opposition. To force every member of the acting profession into one organization, to be compelled to place your affairs in the hands of a few self chosen leaders, and to be ruled by, and dictated to, and to just how and when, and where you are to act, and to be placed in the position that unless you work and live according to the rules and regulations laid down by a few "radicals," you will find yourself without any place to turn - without any alternative but to pay any penalty they care to place upon your head in the severest form of closed shop.
And, that is exactly, what they are edging you up to by trying to make you believe that it is something it is not - they can call it "Equity shop" or any other old shop at all, but its "closed shop" just the same and it spells ruin to the acting profession - I am not speaking for any organization of managers. I am not a member of the P.M.A. (Producers Management Association). I withdrew from that body during the strike when I became a member of "The Fidelity League." There is one more thing I fought for throughout the strike, and only one thing, and that was for "open shop." There is one thing I will fight for as long as I am a member of this profession, and that is an "open shop." The Leaders of Equity claimed during the strike that they did not want a "Closed Shop" and when this statement was made, I went before the P.M.A. and fought for and brought forward a new form of contract (the form of contract you are using today) with far more concessions than the Equity was demanding. I got you an extra one eighth in Chicago and other cities where Sunday night shows had already been established. I got you the "play or pay" clause Holy week and week before Xmas. These were things outside of the Equity demands that I ferociously fought for, and got for you along with everything else you wanted, and were asking for.
This contract was presented to all members of the acting profession, and still with a far better contract than the Equity claimed they were "striking for." The Equity crowd refused to accept peace, why? There is but one answer, they wanted "closed shop." That was the real issue, but the rank and file could be fooled no longer, and it looked for a time as though the Equity Association would cave in or break into factions.
Then, Augustus Thomas was called in and brought them to their senses and arranged a meeting that saved the day and saved the Equity. And now perhaps you'd like to know just who called in Augustus Thomas at the crucial moment - I called him in, and so I claim that I got for you every advantage the new contract gives you. I claim I got you a far more liberal and better contract than has ever been issued before. I claim that whatever you made, you made through me and my efforts to protect the actor while I was being condemned by the same people I was actually fighting for.
The main issue was the "Closed Shop." That's what Equity wanted. When I say Equity, I mean the self chosen leaders. There was just one thing I fought for and that was "open shop" and I won. I'm for the actor. Always have been for the actor - always will be for the actor, and any actor who knows me knows I speak the truth. Don't let them trick you into accepting something you do not want. Don't let them sneak this issue through under a different name. "Equity Shop" is a "Closed Shop." And "Closed Shop" so far as the acting profession is concerned can never be. It is a business of unique and individual service and unless it remains so there can be no hope for any artistic, or financial success, or achievement in the Theater of America. That's the way I feel about it, and that's why I've fought and will continue to fight for the "open shop." Don't let them trick you. Play the game and play it square. Don't fight a selfish fight, fight for the Theater and protect the actors.

George M. Cohan

Don't let the council of the Equity tell you that they got you these things because they never even dreamed such a contract could ever be had. I got this contract for you and I got it after a long, hard, bitter fight. Ask any member to the P.M.A. if this is not the truth. 

En 1922, Georgette Cohan, sa première fille alors âgée de 21 ans et pianiste accomplie, avait exprimé à son père son intérêt pour la scène théâtrale. George a rapidement - trop rapidement ? - écrit une comédie pour elle, Madeleine and the Movies () (1922 - 80 représentations). Georgette en jouait le rôle principal. Il s'agit d'une histoire un peu invraisemblable d'une star de cinéma, Garrison Paige, surpris de trouver une jolie jeune femme dans son appartement. Elle lui révèle qu’elle est Madeleine Madigan et avertit Paige que son père et son frère sont à sa recherche, car ils ont trouvé une cachette où elle dissimulait des photographies de Paige. Ils croient que ce dernier tente de la séduire. Ce ne fut pas un succès. Et quand l’échec financier du spectacle devint évident, Cohan a décidé de jouer le rôle du père pour tenter de relancer les ventes. Cela a fonctionné pendant une courte période, mais le show a du fermer rapidement. Cette production ne s’est pas révélée utile mais surtout pas digne de la réputation de Cohan. Georgette allait bientôt se marier et quitter le théâtre.

Cohan a ouvert la saison 1922-23 avec la pièce So This Is London () (1922 - 343 représentations) qui s’est avéré être l’une de ses productions qui a eu la plus longue série. Écrite par Arthur Goodrich, et mettant en vedette Lilly Cahill et Edmund Breese, Cohan a remanié une bonne partie des dialogues, mais il a refusé d'être crédité pour l'écriture du livret. Sa règle était que s’il avait écrit au moins 50% de la pièce, alors, et seulement alors, il acceptait un crédit d’écriture. La pièce a été retravaillée et transformée en film en 1930.

Plus tard cette année-là, le 13 novembre 1922, George M. Cohan revient dans le monde des musicals avec un succès, Little Nellie Kelly () (1922 - 276 représentations). Les personnages principaux ont été nommés Jerry & Nellie, comme ses parents, et Cohan a dédié Little Nellie Kelly () à la mémoire de son père et de sa mère survivante. Pour Cohan, c’était une tentative de cohanisation d’un musical de style 1920. C’était une petite évolution par rapport à son style précédent (à la fois au niveau du livret et de la musique), mais pas assez pour ne pas être qualifié de «démodé» par la presse. Mais le spectacle a été néanmoins un succès populaire à Broadway et lors des tournées. Cohan a aussi produit Little Nellie Kelly () à Londres où il a également rencontré un succès.

La musique de Cohan dans Little Nellie Kelly () contenait des hits que l'on peut aujourd'hui écouter sur l’album de la bande sonore de George M! () : Nellie Kelly, I Love You, All In The Wearing, They are All Our Boys (rebaptisée All Our Friends), et le souvent sous-estimé Dancing Our Worries Away.

Signalons encore qu'en 1940, la MGM réalise un film intitulé Little Nellie Kelly () qui ne ressemble en rien au musical original. Le film a mis en vedette Judy Garland.

F.4) 1923-1929 : un long et lent déclin

Un an plus tard, le 25 décembre 1923, Cohan proposa au Liberty Theatre son nouveau musical, The Rise of Rosie O'Reilly () (1923 - 87 représentations) pour lequel il a écrit le livret, les paroles et la musique ... et qu'il a produit. Il s'agissait d'un musical du type Cendrillon qui faisait un clin d’œil aux autres Cendrillon-musicals. En fait, sous le titre du spectacle sur la couverture du programme, il y avait une note entre parenthèses: «Moquons-nous de Cendrillon». La chanson d’ouverture était The Arrival of the Plot dans laquelle l’ensemble nous avertit de Stay out of the chorus, et à la fin du spectacle, on en retrouve une autre intitulée The Plot Again. Outre leurs personnages-vedette, de nombreux membres de la distribution ont également joué des rôles anonymes dans l'ensemble et le programme les a identifiés comme: «Les contrebandiers, les policiers, les préposés, les grimpeurs sociaux et toutes sortes de personnes particulières [qui] chantent et dansent dans un état d’esprit de comédie musicale.» Un second degré permanent...

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Partition «The Rise of Rosie O'Reilly»

Encore une fois, Cohan a fourni une partition mémorable avec des chansons qui ont marqué comme Let’s You & I Just Say Goodbye, Love Dreams et l’irrésistible Ring To The Name Of Rosie qui fera partie de George M! (). Mais malgré ce second degré et ces chansons, la formule utilisée par Cohan pour créer ses musicals à succès commençait à s'essoufler.The Rise of Rosie O'Reilly () n’a connu qu’un succès très modéré car le public était de plus en plus attiré par une nouvelle forme de musique, le jazz, une musique que Cohan ne maîtrise pas du tout. Et d'une manière encore plus générale, les goûts des américains pour leurs loisirs avaient profondément changés car les Etats-Unis avaient oublié les affres de la Première Guerre Mondiales et vivaient désormais dans une période de croissance et d'insouciance qu'ils appelèrent les «Roaring Twenties» - en France ce furent les «Années Folles» et en Allemagne les «Goldene Zwanziger». George M. Cohan se trouve dans une position difficille qu’il n’avait plus connue depuis ses jours de lutte dans le Vaudeville: il devenait impopulaire.

Une semaine après l'ouverture de The Rise of Rosie O'Reilly (), le 31 décembre 1923 a présenté une pièce de théâtre qu'il a écrite: The Song and Dance Man () (1923 - 96 représentations). Pour une fois, la presse fut très bonne. Et George y jouait le rôle principal. L’intrigue de The Song and Dance Man () concerne un interprète de chant et de danse qui n’a jamais pu échapper à son amour du théâtre. Dans le rôle de Hap Farrell, Cohan a dépeint un chanteur et danseur de vaudeville sans le sou, qui, après avoir obtenu un succès financier dans les secteur minier, décide de remonter sur scène même sans aucune certitude financière. La pièce était essentiellement une rêverie de Cohan sur une lancinante question personnelle: et si lui et sa famille n’avaient jamais quitté le vaudeville? Que leur serait-il arrivé? Dans son autobiographie, Twenty Years On Broadway, And What It Took It Get There, Cohan a répondu à tous ceux qui reconnaissaient enfin en lui un grand acteur:

« Et maintenant vient le grand rire de l’histoire, le vrai punch de l’histoire. Les acteurs ont admis que j’étais un bon acteur. Bon sang! Pourquoi m’ont-ils fait attendre si longtemps? Eh bien, en tout cas, j’avais enfin réussi à m’épanouir. Mes rêves s’étaient tous réalisés. Ma plus haute ambition a enfin été satisfaite. Hourra! Je suis un bon acteur! »

George M. Cohan


L’année suivante, George M. Cohan s'est à nouveau lancé dans une aventure différente: iI a décidé d’écrire ses mémoires et de les appeler «Twenty Years On Broadway, And What It Took To Get There». Etonnamment, il consacre très peu d’espace à sa carrière après 1900, et ne fait que peu ou pas de mention à sa propre famille, à sa première femme Ethel, à la grève de l'Actors' Equity ou à la rupture de son association avec Sam Harris.

En 1925, les modifications des préférences musicales en Amérique, après quelques années de frétillement, se sont totalement généralisées. Le jazz était maintenant la musique populaire, et des compositeurs comme George Gershwin () dont le brillant Rhapsody In Blue avait été publié l’année précédente, Irving Berlin (), Jerome Kern (), et l’équipe de DeSylva, Brown & Henderson, composaient maintenant pour les musicals de Broadway. Eugene O’Neill était devenu le meilleur dramaturge en Amérique, peut-être au monde. Des artistes comme Al Jolson, Eddie Cantor, Fred & Adele Astaire, Marilyn Miller, Lunt et Fontanne dominaient le cœur et l’esprit des spectateurs. George M. Cohan n’a joué aucun rôle dans ce mouvement. Ses œuvres appartenaient au monde des deux décennies précédentes.

Il faudra presque attendre deux ans après The Song and Dance Man () pour que George présente le 5 octobre 1925 une nouvelle oeuvre à Broadway, une pièce de théâtre, American Born () (1925 - 88 représentations). Ce fut un échec qui n'a même pas pu être sauvé par la présence de George sur scène dans le rôle principal. The Home Towners () (1926 - 64 représentations) qui a suivi dix mois plus tard, le 23 août 1926, a également été un désastre.

Dans la foulée, en septembre 1826, Cohan produisit et mis en scène une pièce de Margaret Vernon, Yellow () (1926 - 135 représentations), qui fut créée avec un acteur qu’il admirait vraiment, un jeune homme de 26 ans nommé Spencer Tracy. De la même façon, Tracy avait tellement admiré Cohan qu’il a eu peur de la scène en sachant que Cohan le regardait dans le théâtre vide. Cohan croyait en ce jeune acteur, et a demandé à être présenté à lui (il l'a plus tard publiquement appelé "le meilleur acteur Goddamned que j’ai jamais vu"). Les deux ont bientôt formé une amitié qui a duré le reste de la vie de Cohan. Tracy est très clair lorsqu’il se rappelle la première fois qu’il a rencontré Cohan:

« Savez-vous ce que vous avez fait pour moi à l’époque, George M.? Vous m’avez donné confiance en moi. Comme vous l’avez donné à des centaines d’autres. D’une façon ou d’une autre, par un simple mot ou un geste, vous transmettez à une personne que vous croyez en elle - et ainsi elle peut croire en elle-même. »

Spencer Tracy


Le seul conseil d’acteur que Cohan a jamais donné à Tracy était simple dans son concept, mais que beaucoup d’acteurs des années 20 n’avaient pas encore maîtrisé. C’était un style que Tracy non seulement a vite maîtrisé, mais l'a catapulté au sommet du star-système. Cohan lui a conseillé: «Spencer, tu dois moins jouer.» La seule déception de Cohan dans sa relation amicale avec Spencer Tracy fut la décision de ce dernier d'abandonner le monde théâtral de Broadway pour la carrière moins sérieuse, mais financièrement plus enrichissante d'acteur de cinéma à Hollywood.

Il faudra attendre à nouveau un an pour assister à la création suivante de Cohan, le 12 septembre 1927, la pièce Baby Cyclone () (1927 - 184 représentations), dont il est l'auteur. Le spectacle qui a été un succès mineur, s'intéresse sur un chien pékinois (Cyclone), qui est favorisé par sa maîtresse, et se fait vendre par son mari (Grant Mitchell) qui ne supporte pas le chien, ou la façon dont sa femme le traite. Au cours de l’histoire, il se rend compte que la culpabilité qu’il ressent envers sa femme est beaucoup plus grande que lorsque Cyclone était là. Spencer Tracy joue das ce nouveau spectacle.

Deux semaines plus tard, Cohan se retrouve sur scène dans le musical The Merry Malones () (1927 - 184 représentations) qu'il produit et dont il a écrit le livret, les paroles et la musique. Le spectacle s'est joué pendant sept mois (dont une pause de trois semaines vers la fin de sa série au cours de laquelle la pièce de Harry Segal The Behavior of Mrs. Crane a été brièvement présentée à l'Erlanger’s Theatre) pour un total de 216 représentations. Cohan n’avait pas l’intention de jouer personnellement dans le musical, mais pendant les try-out à Boston, Arthur Deagon mourut. En moins de 24 heures Cohan a appris le rôle, et après 5 heures de repos, a donné une représentation qui a été accueillie par une standing-ovation. Cohan à jouer le rôle lors des dernières représentations à Boston puis à New York. Le spectacle était rempli de toutes les marques de commerce Cohanesques et le public a apprécié cette production dynamique, les danses animées et le regard pince-sans-rire de Cohan par rapport aux conventions des musicals de Broadway. Cette dernière approche avait bien fonctionné pour Mary (), et cela a encore été le cas ici.

Pour l'annecdote, pendant les répétitions de The Merry Malones (), un acteur oubliait sans cesse ses répliques. Cela a mené à un dialogue cocasse:

  • - ' M. Cohan, je connais ces lignes à l’envers. ' a plaidé le jeune acteur
  • - ' Et c’est juste comme ça que tu les dis, fils ' a riposté Cohan
  • - ' Vous savez, je savais ces lignes dans mon lit la nuit dernière. ' a protesté le jeune acteur
  • - ' Accessoiristes! Un lit ! ' a crié Cohan

The Merry Malones () est le dernier musical produit, écrit, mis en scène par George M. Cohan. Il aallait continuer à écrire et à mettre en scène mais ne produirait plus qu’un seul musical (Billie () (1928)) et jouerait seulement dans deux autres (The Phantom President () (1932) et I'd rather be right () (1937)). The Merry Malones () a été la dernière occasion de combiner ses quatre talents.

La vie personnelle de Cohan était aussi pleine de surprises. Sa fille aînée, Mary, s’était enfuie avec un joueur de banjo nommé Neil Litt. La fugue a causé une douleur émotionnelle à George M. Cohan et lui a rappelé à quel point il était éloigné de sa propre famille.

En décembre 1927, il produit la pièce Los Angeles () (1927 - 16 représentations) qui est un terrible flop et enchaîne en février 1928 par une pièce écrite de sa main, Whispering Friends () (1928 - 112 représentations) qui est un succès très mitigé.

À la fin de l’été de 1928, Nellie Cohan est décédée chez elle à Monroe, dans l’État de New York. George était maintenant le seul survivant des «Four Cohan». La mort de sa mère lui a causé beaucoup de chagrin. Il semblait que la seule façon pour lui de surmonter ses problèmes était par son travail.

En 1928, Cohan découvre aussi un autre acteur au style rafraîchissant: Walter Huston. Huston fréquentait déjà les scènes de Broadway depuis quatre ans (il a joué dans la distribution originale de Desire Under The Elms d’Eugene O’Neill). Après une longue nuit de beuverie, Cohan et Huston conviennent qu'Huston apparaitra dans une nouvelle pièce produite par Cohan. Une farce se déroiulant dans le monde du baseball intitulée Elmer the Great () (1928 - 40 représentations). Pendant les répétitions, Cohan a aidé Huston à comprendre l'intérêt à sous-jouer un rôle. Cette technique que Huston a acquise - comme Spencer Tracy - a été quelque chose qu’il a conservé durant sa longue et brillante carrière cinématographique. Cohan fut très heureux lorsque Walter Huston a joué le rôle de son père, Jerry, dans le film Yankee Doodle Dandy. Huston resta toujours l’un des acteurs préférés de Cohan. Trois jours après l'ouverture de Elmer the Great (), le 27 septembre 1928, Cohan a produit une pièce de Ring Lardner, By Request () (1928 - 28 représentations) ... un flop!

Après avoir produit Elmer the Great (), George M. Cohan a repris le dernier spectacle dans lequel ses parents étaient apparus en 1912 Broadway Jones () et l’a transformé en un musical: Billie () (1928 - 112 représentations). Comme la plupart des musicals de Cohan, Billie () était un spectacle de danse qui prenait à peine un moment pour reprendre son souffle. Cohan utilisa la chorégraphie pour accélérer ce spectacle et, par conséquent, Billie () se joua plus de trois mois à Broadway, puis partit en tournée. Pour Billie (), Cohan a produit et a écrit le livret, les paroles et la musique mais ce sont Edward Royce et Sam Forrest qui ont été les metteurs en scène. Billie () est le dernier musical composé par Cohan. Il en avait marre qu'à chaque nouvelle production les critiques les qualifient de «old fashioned». Il était très déçu d’un monde dont il fut autrefois le roi mais un monde qu’aujourd'hui il ne comprenait plus du tout et qui ne le comprenait pas.

Après la mort de sa mère, il a vendu sa maison à Great Neck, Long Island et a déménagé sa famille à la maison de ses parents à Monroe, NY.

La dernière apparition de Cohan sur scène dans les années '20 est dans la pièce Gambling () (1929 - 152 représentations) qu'il a écrite. Dans la pièce, Cohan incarne un joueur, qui cherche à exposer le meurtrier de sa fille adoptive. Durant la tournée, un autre acteur alors inconnu a incarné le petit ami et meurtrier de la fille, Clark Gable. Gambling () ouvrit ses portes le 26 août 1929 et se joua assez longtemps après le terrible krach boursier d'octobre 1929 qui allait mettre fin de manière brutale aux «Roaring Twenties». Cinq ans plus tard, Gambling () bénéficia d'une adaptation cinématographique qui deviendrait le deuxième film parlant de Cohan.