"LE spectacle à recommander pour le réveillon!"
(Le Soir à la création au Théâtre Le Public)

Autant vous le dire tout de suite, Marka n'a pas toujours été Marka !
Alors pour découvrir le vrai Marka, celui que vous n'avez encore jamais vu, le chanteur reprend le cours de sa vie et nous la raconte sur le ton de la confidence. Chaque soir, au hasard, il puise dans le stock de ses petites histoires personnelles : il déballe ses souvenirs d'enfant bruxellois, sa découverte des punks dans Hit Magazine et sur les bancs de l'école, le premier album envoyé à la presse avec des pralines, les vendanges tardives avec Dutronc, le premier disque d'or avec " Allez allez "... Le tout, la guitare sèche en bandoulière et l'humour en sautoir !


On fait tout un plat de Stromae mais on ferait bien de se pencher sur une autre parabole de notre petit pays. D’accord, son répertoire n’a pas les atours dance-floor et le retentissement international du maestro, mais Marka cristallise lui aussi cet indéfinissable mélange de gouaille et de mélancolie, de poésie surréaliste, et surtout d’autodérision que nous envie le monde aujourd’hui.

Avouons-le tout de go, on a d’abord craint l’overdose narcissique en voyant le programme du chanteur : un stand-up sur sa vie, doublé d’un livre autobiographie et d’un CD avec son best-of en dédicace à la sortie. Eh bien, on a vite ravalé nos préjugés devant un spectacle, certes axé sur le parcours du quinquagénaire, mais déballé avec une belle humilité et une transparence totale sur les hauts et les bas de sa vie d’artiste. Surtout, le chanteur - qui fait ici ses premiers pas de comédien - révèle une présence chaleureuse, décontractée et bourrée d’humour, tant et si bien qu’on soupçonne sa compagne, l’humoriste Laurence Bibot, de lui avoir refilé quelques tuyaux.

Accompagné par l’accordéon d’Aldo Granato et la batterie d’Antoine Rotthier, le chanteur-comédien est une vraie bête de scène. Il accroche son public dès les premières minutes et ne le lâche plus pendant deux heures, le faisant rire ou chanter en chœur. Il l’entraîne sur le fil d’une existence qui commence à Molenbeek, plutôt cocasse pour celui dont le vrai nom est Serge Van Laeken. « A Molenbeek, tu devenais flic ou voyou même si j’ai des copains qui sont devenus les deux », plaisante-il tout en racontant ses origines flamandes avec son parlé coloré et rustique, ou encore sa « bobonne » qui lui a fait ses tartines jusqu’à ses 20 ans. Plutôt médiocre à l’école, il s’acoquine avec une bande de punk rockers (« qui se mettaient du vicks vaporub dans les cheveux et égorgeaient de la volaille sur scène ») et se retrouve bassiste pour le groupe Allez Allez qui devient disque d’or en Belgique avec African Queen, se fait signer par Virgin UK, « le label de Sting », et se produit à Forest National. « Je me suis dit, ça y est, me voilà sorti du no man’s land culturel ».

Sauf que des histoires de droits d’auteur et de filles divisent le groupe. Et le chanteur d’avouer les foirages et les vexations qui ont suivi : les groupes qui ne marchent pas, les chantages pour se faire inviter à un mariage peuplé de gros poissons du showbiz, les fiascos à la radio avec des chansons trop grivoises, les pralines et les bobards servis aux directeurs artistiques. Un joyeux bavardage entrecoupé de chansons à croquer comme L’An Passé inspirée de ces vieux qui chaque année retournent à Blankenberge et qui, chaque année, trouvent que l’année d’avant, c’était mieux (« Moins de monde, plus de vieux, ma femme était plus belle mais y a rien d’éternel. »). Et puis il y a l’incroyable malchance d’Accouplés, retiré des ondes après les attentats à la bombe dans le métro de Paris, ou encore la tournée des Fnac et des villages de vacances français, forcément moins glamour qu’un set à l’AB.

On ne va pas tout vous raconter - ce serait vous gâcher le plaisir. Disons juste que Marka qui se met à nu comme ça, c’est la classe, totale !

Catherine Makereel - Le Soir - 25/12/2013

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