Prix de la Critique 2016 – Meilleur Seul en scène
Cinq ans auparavant, il tue sa femme. Dans cette autobiographie, un des plus grands esprits de son temps, Louis Althusser, interprété par Angelo Bison, tente, mais en vain, de comprendre avec une honnêteté effarante un geste à jamais incompréhensible. Une performance à la frontière entre folie et hyper-conscience. À la place fragile où, en réalité, sont tous les Hommes. Ce spectacle a reçu le Prix de la critique du meilleur seul en scène 2016.
Ce qui aurait pu être un fait divers se révèle être une tragédie contemporaine…
Le 16 novembre 1980, Louis Althusser, célèbre philosophe marxiste, communiste convaincu, professeur à l'École normale supérieure de Paris, étrangle sa femme, Hélène.
Il est reconnu 'non responsable' de son acte, selon l'article 64 qui permet aux criminels atteints de démence de 'profiter' de soins psychiatriques, plutôt que de suivre le circuit judiciaire et pénitentiaire habituel.
En 1985, Louis Althusser écrit une autobiographie qui sera publiée après sa mort. Son besoin est vital : écrire cet avenir-là, c'est avant tout tenter de redevenir responsable de sa vie. Retrouver une identité.
Pourtant l'interrogation reste totale : pourquoi a-t-il tué Hélène ?
Impossible de ne pas être troublé par cette performance follement habitée. Dès qu’Angelo Bison entre sur scène, qu’il se pose sur son tabouret et pose sur nous ses yeux insensés, bordés d’une inquiétante lueur, nous sommes happés par son récit.
Consulter article completLe Soir – 17 janvier 2017 – Catherine Makereel
Angelo Bison interprétant Althusser est au sommet de ses capacités scéniques. Il doit " défendre " un personnage peu sympathique, incarner un fou sans tomber dans la caricature ou l’emphase d’un plaidoyer de Cour d’assises. Le metteur en scène Michel Bernard a su le "cadrer" au plus juste de son expressivité : assis sur un petit tabouret, il se raconte sobrement laissant affleurer les grondements sourds de la folie. Son visage, intense, douloureux, inquiétant nous fait passer par toutes les couleurs de l’émotion.
Consulter article completChristian Jade - RTBF
Dans ce texte exceptionnel, un des plus grands esprits de son temps tente, mais en vain, de comprendre avec une honnêteté effarante un geste à jamais incompréhensible.
C’est peu dire qu’Angelo Bison incarne le philosophe. Seul en scène pendant près d’une heure et demie, quasi tout le temps assis sur un tabouret, il fascine, il frémit, il s’angoisse, comme Althusser. Il joue des yeux, il utilise les silences et les vibrations de sa voix. Une performance qu’on ne quitte pas des yeux et où, comme Althusser, il semble se situer toujours à la frontière entre folie et hyper-conscience. À la place fragile où, en réalité, sont tous les hommes.
Créé en 2016, dans l’adaptation et la mise en scène de Michel Bernard, ce spectacle a reçu de manière méritée le Prix de la critique du meilleur seul en scène.
La Libre Culture – 13 janvier 2017 – Guy Duplat
Le théâtre nous emmène tôt ou tard dans l’insondable. De ces voyages jusqu’au bout de la nuit qui remettent les compteurs à zéro de ce qu’on sait de la vie.
Consulter article completFocus Vif – 20 janvier 2017 – Nurten Aka
Ce texte adapté à la scène par Michel Bernard, révèle la complexité de la personnalité de cet énorme intellectuel, vedette des tribunes philosophiques dans les années 70.
Posé sur un tabouret dont il ne dévissera pas le temps du spectacle, le comédien Angelo Bison traque la folie qui s’insinue dans l’esprit de son personnage. Par quelques mouvements de la main ou du bras, il signifie pleinement le désarroi, l’inquiétude d’Althusser. A son tour, le public vissé à ses paroles, à son regard égaré, complètement fasciné par le jeu du comédien, ingurgite sans en laisser une goutte, ce témoignage de la virée au bord du précipice d’un grand esprit de son temps. Et même si le sujet d’une extrême gravité ne se prête pas aux adjectifs fleuris, il s’agit bel et bien pour Angelo Bison d’une performance fabuleuse.
Entre les lignes – 23 janvier 2017 – Lucie Van de Walle
Il est rare d’être ému au théâtre, au point d’avoir les larmes aux yeux. C’est d’habitude au cinéma qu’on sort son mouchoir… Mais là, dans cette petite salle du théâtre Poème 2, j’ai été complètement emportée par le texte autobiographique bouleversant de Louis Althusser, philosophe majeur de son époque qui, le 16 novembre 1980, a étranglé sa femme Hélène.
Une prestation magnifique d’Angelo Bison qui incarne comme s’il les avait vécus au plus profond de son être les tourments de son personnage. Angelo Bison est un acteur hypnotique, expressif, touchant et inquiétant à la fois. On ne quitte plus son regard, on boit ses paroles et on retient son souffle. On comprend pourquoi ce seul en scène a été primé en 2016 et c’est une chance de pouvoir le revoir.
Déclaré irresponsable au moment des faits – Louis Althusser était régulièrement interné pour des crises maniacodépressives – il ne sera jamais jugé et survivra 10 ans à son geste. Son désespoir étant justement de ne pas avoir eu droit à un procès, d’avoir eu droit à la parole publiquement pour exprimer le cheminement l’ayant mené à cet acte violent. Au lieu de ça, il s’est retrouvé emmuré dans l’espace protégé de l’hôpital psychiatrique, ne pouvant calmer ses angoisses que grâce aux électrochocs.
Pascale Navez - RTBF
Rien encore sur ce spectacle
Version pleine page (seule version disponible monde Apple)
LE 16 NOVEMBRE 1980, VERS NEUF HEURES DU MATIN, UNE FEMME EST ÉTRANGLÉE DANS UN IMMEUBLE DE LA RUE D’ULM À PARIS…
Un fait divers comme tant d’autres s’il ne s’était pas commis dans un des lieux les plus prestigieux de la pensée française et si l’auteur du méfait n’avait pas été un des plus brillants philosophes de sa génération.
L’endroit du crime… Un des appartements de fonction de l’École normale supérieure. L’auteur, un des professeurs de l’établissement : Louis ALTHUSSER. Le mobile… aucun. La volonté de tuer… aucune. La raison… aucune. La justification… aucune. Les circonstances… Un massage matinal, geste habituel de tendresse offert à une compagne à son réveil. Geste qui s’attarde sur une nuque offerte pour devenir geste de mort. Comme si le méfait avait été commis par un homme sorti du temps et entré dans l’inconscience. L’homme ne se souvient que d’une seule chose : l’image d’un visage devenu définitivement immobile. Le massage est devenu étranglement. Il réalise qu’il a, sous ses mains, une morte… Il appelle le secours d’un médecin à qui il peut tout juste dire qu’il vient d’étrangler sa femme avant de tomber dans un état de profonde prostration…