Jacqueline Bir au Festival Bruxellons!
Accueillir une actrice comme Jacqueline Bir est pour nous bien sûr un énorme plaisir, mais c'est avant tout un honneur. C'est pour nous une référence, au sens noble du terme: une diection à suivre.
Après Danielle Darrieux (que dirigeait Christophe Lidon), « Oscar et la Dame Rose » connaîtra bientôt une autre interprète d’exception. Jacqueline Bir, figure emblématique du théâtre belge, portera ce texte magnifique sur les planches. La comédienne, qui fêtait en 2003 ses 50 ans de carrière, a toute la verve, l’espièglerie, la simplicité aussi d’une mamie Rose. Elle sera mise en scène par une autre grande dame : Daniela Bisconti, dont l’acuité, le charisme et la sensibilité devraient faire merveille dans cette création.
Un duo de femmes dont on attend avec impatience le fruit de l’échange et de la complicité.
Festival/ Sa Première apparition à Avignon.
Au bas de la rue Saint Agricol, une ruelle mène au Petit Louvre. En y arrivant sur le coup le 12h15, on s’inquiète un peu. Personne sur le trottoir. Pourtant dans un petit quart d’heure, Jacqueline Bir entre en scène pour interpréter « Oscar et la dame rose » d’EricEmmanuel Schmitt. Il faut pénétrer dans le porche du théâtre pour se rassurer. Sagement alignés, les spectateurs attendent l’ouverture des portes. Ils sont une bonne centaine.
« Le premier jours, il y en avait 19, raconte Alain Leempoel, producteur du spectacle. Pour une ouverture dans le Off, à Avignon, c’est déjà un succès. Il arrive qu’on joue devant deux ou trois spectateurs ici. » Depuis, le public s’est étoffé chaque jour. Et aujourd’hui, parmi les spectateurs, on compte des journalistes du Figaro, de France 3 et une équipe de France 2 qui filme un extrait du spectacle pour l’émission Les terrasses des festivals diffusée ce vendredi soir. Pas mal pour un début.
Bien sûr, le nom d’Eric-Emmanuel Schmitt joue à fond pour attirer public et médias. D’autant que l’auteur s’est fortement investi aux côtés d’Alain Leempoel et des comédiens. Rencontre avec le public, présence dans les salles, interview dans lesquelles il vante amplement les mérites de nos comédiens, il est partout. Une présence qui profite à Oscar et la dame rose mais aussi au Visiteur qu’Alexandre von Sivers, Benoît Verhaert, Natalie Laroche et Gérald Wauthia jouent dans la même salle à 18 heures.
L’ambiance est détendue dans la petite cour où Eric-Emmanuel Schmitt déjeune en compagnie de quelques amis, en attendant la fin du spectacle. Soudain, on entend des applaudissements. Enthousiastes. Puis des cris, des bravos. Quelqu’un ouvre la porte du théâtre pour que tous profitent de la chaleur de l’accueil réservé à la comédienne. « Ils sont debout ! », lance Alain Leempoel à Eric-Emmanuel Schmitt, la fourchette suspendue au-dessus de son « assiette fraîcheur ». « Je fais semblant que ça ne m’intéresse pas mais en fait, je n’en perds pas une miette », se réjouit-il.
Bientôt, le public sort. En passant à la hauteur de sa table, plusieurs spectateurs le saluent, le remercient. Eric-Emmanuel Schmitt est un auteur médiatique. Mais ici, il la joue discret, laissant la gloire à l’unique interprète de son texte, la formidable Jacqueline Bir.
Et la voici déjà qui arrive, des étoiles plein les yeux, gonflée à bloc. « Ah ! J’ai l’impression de redébuter. C’est quand même une sacrée aventure dans laquelle ont s’est lancé. » Cette aventure, c’est Alain Leempoel qui lui a proposée. « Moi, ca ne me serait jamais venue à l’idée. Je suis venue ici il y a …2.000 ans pour voir Gérard Philipe. Depuis, je n’y ai jamais remis les pieds. J’ai peur de la foule. »
« Une mise en danger »
La voici donc de retour, après une carrière incroyablement riche où elle a arpenté toutes nos scènes, du théâtre des Galeries au théâtre National en passant par le parc, Villers-laVille et des tas d’autres lieux. « Franchement, j’avais très peur avant de commencer. Outre ma peur de la foule, je ne supporte pas bien la chaleur et à mon âge, c’est un problème quand il faut jouer chaque jour à midi. De plus, ici en France, le rôle avait déjà été joué par Danielle Darrieux et Anny Duperey. Le public allait-il suivre après ces stars ? Mais je trouvais que c’était un beau challenge. »
Alors, elle s’est lancée. Comme la jeune comédienne française qu’elle était, quittant tout pour débarquer à Bruxelles avec son compagnon Claude Volter. « Avignon, c’est une mise en danger. Avec mon parcours, avec tout ce que j’ai joué, je suis un peu au bout de ma route. En Belgique, je suis reconnue. Les salles sont pleines. Mais ici ? Je voulais savoir si ça fonctionnerait ici aussi. »
Jean-Marie Wynants
Jean-Marie WYNANTS - Le Soir, 12/07/2007