Une délicieuse farce sur notre plat pays avec une autodérison féroce!
Dimitri Verhulst, auteur de la mémorable Merditude des choses, réussit un nouveau coup d’éclat ! Dans cette fable sans concession, il pose un regard tendrement corrosif sur la Belgique, et férocement drôle sur nos comportements égoïstes. Faut-il donc l’arrivée d’un Dieu pour rendre le monde vraiment meilleur?
Un flot d’images et de personnages délirants interprétés avec brio par Eric De Staercke. Un spectacle drôle et percutant.
Le Christ revient ! Et comme l’avait imaginé James Ensor, il a choisi Bruxelles pour son grand retour. Le 21 juillet qui plus est ! Tandis que l’Eglise se prépare à rendre des comptes, le pays accueille la nouvelle avec allégresse; le Manneken Pis se pare d’une couronne d’épines, les chauffards changent de ton, les quartiers fleurissent. C’est l’effervescence au sein des différents gouvernements réunis à Val-Duchesse. Car la venue du Christ n’est pas sans créer des problèmes logistiques: qui accueillera le Sauveur?
Et dans quelle langue?
Faut-il investir dans la sécurité du Christ vu notre dette publique abyssale… il a la vie éternelle, non?
Etre bruxellois et belge n’est pas un mérite, et pour être honnête je me suis toujours méfié des gens qui arborent leur nationalité comme un label de qualité […] Je suis ce fou inoffensif qui rêve doucement d’un monde sans nationalités, sans drapeaux.
Seul sur scène, Eric De Staercke réussit l’exploit de convoquer cette belgitude tous azimuts. Avec cette nonchalance échevelée, son aplomb terre-à-terre, le comédien est le parfait réceptacle de cette Belgique surréaliste, improbable assemblage qui tient encore par on ne sait quel miracle.
A lui seul, il tient cette ville carnavalesque, et ses masques souvent grotesques à l’image du tableau d’Ensor, « L’entrée du Christ à Bruxelles », qui a forcément inspiré le texte. Comme les pantins grimaçants, déformés par la jalousie, la cupidité, l’hypocrisie, suivant un pitre avec une mitre et un bâton dans le chef-d’œuvre d’Ensor, Eric De Staercke déverse un flot de personnages et d’images représentant une Nation égarée en quête d’un berger pour changer la petitesse de son existence.
Mis en scène dans une belle sobriété par Georges Lini, le comédien hirsute déballe tout cela avec une féroce autodérision. D’un geste, d’un clin d’œil, il nous fait éclater de rire, notamment quand la parade destinée au Christ se transforme en caravane du Tour de France avec distribution d’hosties bio. Et soudain, la farce passe au manifeste politique : « Je suis ce fou inoffensif qui rêve doucement d’un monde sans nationalités, sans drapeaux. »
Catherine Makereel - Le Soir
On est heureux de retrouver Eric De Staercke seul sur les planches, ce qui ne lui était plus arrivé depuis quelques saisons. Ce texte lui va à merveille : il peut y exercer son talent d’humoriste pince-sans-rire, et parcourir, de sa généreuse présence, les stations de ce corrosif chemin de croix. Le metteur en scène Georges Lini joue de toutes les qualités de son acteur pour nous offrir un spectacle drôle et percutant, accompagné pour (presque) seule scénographie, d’images vidéo bien choisies qui font puissamment résonner le comique des situations.
Vous ne connaissez pas Dimitri Verhulst ? Précipitez-vous à l’Atelier 210, il y a là une belle occasion de le rencontrer. Et si vous avez lu le roman, vous aurez le plaisir de le redécouvrir, mis en lumière avec intelligence et talent.
Dominique Mussche - RTBF
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Et si, comme l’espérent nombre de croyants, le Christ revenait. Et si, comme l’avait déjà imaginé Ensor, le Christ choisissait comme lieu de parousie Bruxelles, la capitale de l’Europe et de cette Belgique, qui malgré les coup de boutoir de « Belgïe barst » toujours plus fréquents, n’a toujours pas crevé.
La Belgique n’a toujours pas crevé […] Bien sûr que la Belgique allait un jour cesser d’exister pour être remplacée par quelque chose dont l’éternité serait tout aussi peu garantie. Longue vie n’est donnée qu’aux éponges, et même elles doivent tôt ou tard dépérir.
En quatorze stations, Dimitri Verhulst explore ce que cette annonce de la venue du Christ à Bruxelles (qui plus est un 21 juillet, fête nationale belge) peut porter en elle d’espérance et de questionnement. Car cette entrée, on s’en doute, nécessite toute une préparation. Quelle sera l’itinéraire du Christ? Qui l’acceuillera? Que lui faire visiter de la ville? Et, bien évidemment, dans une ville à la complexité institutionnelle pour le moins remarquable, toutes ces questions d’organisation prennent des dimensions inconnues autre part. Occasion pour l’auteur, en mauvais flamand revendiqué, de nous réjouir d’envolées sur le nationalisme ambiant.