Jacqueline Bir au Festival Bruxellons!
Accueillir une actrice comme Jacqueline Bir est pour nous bien sûr un énorme plaisir, mais c'est avant tout un honneur. C'est pour nous une référence, au sens noble du terme: une diection à suivre.
Après Danielle Darrieux (que dirigeait Christophe Lidon), « Oscar et la Dame Rose » connaîtra bientôt une autre interprète d’exception. Jacqueline Bir, figure emblématique du théâtre belge, portera ce texte magnifique sur les planches. La comédienne, qui fêtait en 2003 ses 50 ans de carrière, a toute la verve, l’espièglerie, la simplicité aussi d’une mamie Rose. Elle sera mise en scène par une autre grande dame : Daniela Bisconti, dont l’acuité, le charisme et la sensibilité devraient faire merveille dans cette création.
Un duo de femmes dont on attend avec impatience le fruit de l’échange et de la complicité.
L’ambiance est détendue dans la petite cour où Eric-Emmanuel Schmitt déjeune en compagnie de quelques amis, en attendant la fin du spectacle. Soudain, on entend des applaudissements. Enthousiastes. Puis des cris, des bravos. Quelqu’un ouvre la porte du théâtre pour que tous profitent de la chaleur de l’accueil réservé à la comédienne. « Ils sont debout ! », lance Alain Leempoel à Eric-Emmanuel Schmitt, la fourchette suspendue au-dessus de son « assiette fraîcheur ». « Je fais semblant que ça ne m’intéresse pas mais en fait, je n’en perds pas une miette », se réjouit-il.
Bientôt, le public sort. En passant à la hauteur de sa table, plusieurs spectateurs le saluent, le remercient. Eric-Emmanuel Schmitt est un auteur médiatique. Mais ici, il la joue discret, laissant la gloire à l’unique interprète de son texte, la formidable Jacqueline Bir.
Jean-Marie WYNANTS - Le Soir, 12/07/2007
La mise en scène de Daniela Bisconti ne cherche ni le pathos ni le rire forcé, malgré l'humour du texte. Elle laisse la place à des sentiments plus subtils que le jeu magistral de Jacqueline Bir décuple. On pourrait parler de mise en scène serrée - comme notre gorge. La scénographie de Vincent Lemaire bâtit un petit plateau incliné, avec un gros fauteuil, loin de toute illustration d'un hôpital. Abstrait ? Oui, comme les douces lumières de Nathalie Borlée, qui créent de vibrants contre-jours ou une aurore violette.
Mais de cette abstraction naît le jeu concret de Jacqueline Bir. La comédienne s'enfonce dans le fauteuil trop grand et, jambes courtes, devient Oscar. L'instant d'après, elle s'assied avec élégance sur l'accoudoir, et la voilà Mamie Rose. Sa voix suit : ses inflexions sont incroyables, ses métamorphoses soufflantes. Elle a dix, vingt, trente ans... Et quand Oscar meurt, on a tous 120 ans et des rides en moins. Juste des larmes en plus, au coin des yeux.
Laurent ANCION - Le Soir, 15/10/2004
Le texte est signé Eric-Emmanuel Schmitt… Ce monologue est ici confié à Jacqueline Bir. Il faut y courir!
Tout ce que l'on peut vous dire de sa manière infiniment subtile de passer d'Oscar à la dame en une fraction de seconde, par un port de tête, une façon de s'asseoir dans le fauteuil, de balancer ses jambes, de rythmer la phrase, de sourire, ne pourra égaler ce qui se passe sur scène. Il y a là une quintessence de l'art du théâtre le plus rigoureux, dans une humilité inouïe, tournant le dos au pathétisme. Il serait injuste de ne pas y associer Daniela Bisconti, metteuse en scène et adaptatrice, qui a deviné, réveillé et cadré les émotions les plus enfouies de Jacqueline Bir, et Nathalie Borléc, pour ses lumières d'aurore et de tendresse.
Michèle FRICHE - Le Vif/L'Express, 29/10/2004
Seule en scène, elle joue tous les personnages: le petit Oscar, Mamie Rose (une dame au grand cœur extravagante qui visite les enfants hospitalisés), le Dr Dusseldorf, les parents, les petits compagnons d'infortune d'Oscar. La caractérisation de chaque figure est nette et précise. Et il y a de la virtuosité dans sa manière de passer de l'une à l'autre, de les faire dialoguer ensemble, sans jamais tomber dans le numéro d'acteur. Son Oscar tient du clown céleste et du Petit Prince. Sa Dame Rose, ancienne catcheuse reconvertie dans les bonnes œuvres, est une grande âme aimante, un ange consolateur et complice.
Avec Daniela Bisconti, chargée de la mise en scène, s'est instaurée une intelligence féminine, synthèse d'esprit de finesse et de géométrie, qui accouche d'une magistrale prise de rôles.
Guy DUPLAT - La Libre Belgique, 14/10/2004