Le 11 septembre, le monde s’est arrêté.
Le 12 septembre, leur histoire nous a redonné foi en la vie.

«Come From Away» vous transporte au cœur de la magnifique histoire vraie de 7.000 passagers de 38 avions de ligne qui ont atterri d'urgence le 11 septembre 2001 dans la petite ville de Gander à Terre-Neuve dont les habitants vont tout mettre en œuvre pour accueillier au mieux ces femmes et ces hommes venus des cinq continents.
Au milieu des cultures qui s’entrechoquent et de la panique ambiante, l’inquiétude laisse place à la confiance, la musique s’élève dans la nuit et la gratitude se transforme en une amitié qui durera toute la vie.
«Come from Away» montre ce petit monde temporaire où tout le monde est forcé, par des événements bouleversants survenus à des centaines de kilomètres de là, de se réunir et de construire une communauté basée sur des principes de générosité et de bienveillance.


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Au Karreveld, la comédie musicale de l’été, « Comes from Away », chante la simplicité de la vie et des petits bonheurs partagés quand le monde est saisi d’effroi.

Welcome to the rock ! Dans la cour d’honneur du château du Karreveld, à Molenbeek, ce ne sont pas les notes d’un tube heavy metal mais de Come from Away qui ouvrent la nouvelle comédie musicale présentée dans le cadre du festival Bruxellons ! Le « rock », c’est ce rocher canadien auquel s’accroche la bourgade de Gander, à Terre-Neuve. Le 11 septembre 2001, quand les attentats du World Trade Center ont signifié la fermeture de l’espace aérien américain, 38 avions de ligne chargés de 7.000 passagers et 19 animaux, dont un couple de bonobos attendant famille, ont été contraints à un atterrissage forcé sur l’île. Dans un élan de solidarité exemplaire, les habitants de Gander se sont débrouillés pour rassurer, héberger, nourrir ces naufragés de l’air de 96 nationalités différentes et trouver une sage-femme pour Madame Bonobo.

De ces instants dramatiques et authentiques, Irene Sankoff et David Hein ont tiré, en 2017, matière à l’écriture d’une comédie musicale, Come from Away, jouée plus d’un millier de fois à Broadway et couronnée d’une vingtaine d’awards. Cet été, le spectacle de cette extraordinaire (més)aventure est chanté et dansé au Karreveld, mis en scène par Jack Cooper et Anne Mie Gils, dans un décor typique de maisons de bois canadiennes. L’une d’entre elles dissimule un combo de huit musiciens derrière des volets roulants à claire-voie. Ils emmènent les comédiens au rythme d’un tempo folk soutenu.

French-kiss à la morue congelée et shots de screech
Sur scène, deux rangées de chaises permettent aux acteurs de sauter du rôle de passagers d’un avion d’American Airlines, à celui de naufragés de l’air pris en charge par un bus scolaire. Comme les vraies personnes dont les témoignages ont inspiré le spectacle, les comédiens et comédiennes passent par toutes les couleurs de l’angoisse, de l’émotion et de l’humour. A l’école du village, ils assument en chantant avec le maire : « Lorsqu’un étranger nous tombe dessus. » Et ils n’hésitent pas à psalmodier les versets de la Bible, ceux de l’Epître aux Philippiens où l’apôtre Paul écrit « Ne vous inquiétez de rien », pour se faire comprendre de ceux qui parlent hindi, mandarin ou moldave…

Entre-temps, les habitants auront transformé l’école du village pour loger en urgence mille personnes, converti la patinoire en frigo pour stocker la nourriture nécessaire à cuisiner 100.000 repas en cinq jours… Ils ont aussi trouvé les gestes et les mots pour apaiser, surmonter les questions qui fâchent, qu’elles soient de genre, de culture ou de religion. Dans une minute de silence assourdissante à la mémoire des victimes du World Trade Center, partagée avec le public, le Karreveld fond sur l’air d’un cantique de vie et d’espoir.

En apothéose de Come from Away, les comédiens se lâchent complètement pour une scène de bizutage plus vraie que nature. Dans l’idée de faire des 7.000 inconnus tombés du ciel autant de membres de la grande famille des Terre-Neuviens, ils improvisent des french-kiss à la morue congelée et des shots de screech, l’inimitable rhum local, avant d’embrasser le monde et l’humanité. Le tout a été distillé en étroite collaboration avec les véritables habitants de Gander pour enrichir la mise en scène de leur précieux vécu.

Un spectacle qui frappe au cœur de notre humanité
Si le spectacle renvoie une dose d’émotion XXL au public, c’est par la simplicité, la spontanéité, la sincérité et l’humour dans le jeu de l’ensemble des comédiens. Pas une ni un pour chanter plus haut que l’autre. Ils sont à l’unisson du genre humain, versant une larme à la mémoire de « ceux qu’on a perdus » à Manhattan et adressant un sourire à « ceux qu’on a trouvés » à Gander. A ce propos, les vrais passagers sont revenus, dix ans plus tard, de Perpignan, du Panama, de Pékin… habités par une envie gourmande de bonheur et de morue au fromage.

Après My Fair Lady ou West Side Story et avant la Rebecca de Daphné du Maurier et Alfred Hitchcock l’an prochain, Bruxellons ! frappe au cœur avec ce Come from Away. Dans un monde de plus en plus racisé, genré, communautarisé, le spectacle ouvre les esprits à la bienveillance. C’est un chant au vivre ensemble, à la curiosité de l’autre, au respect de la diversité des cultes et des cultures… Personne ne rêvait d’atterrir à Terre-Neuve le 11 septembre 2001 mais tous paieraient cher aujourd’hui pour revivre un seul instant de l’humanité partagée à Terre-Neuve.

Daniel Couvreur - Le Soir - 24/7/2024

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