Pie Tshibanda compare la modernité occidentale et les traditions africaines avec leurs problèmes respectifs.

Pour son deuxième spectacle, Pie Tshibanda compare la modernité occidentale et les traditions africaines avec leurs problèmes respectifs. Après le succès phénoménal de son premier spectacle, le "fou noir" débarque à nouveau sur la scène du pays des Blancs, avec de nouvelles histoires à raconter!


Pie Tshibanda revient sur scène porteur de nouvelles interrogations. Son regard, jadis amusé, se fait plus songeur pour aborder la vie, l'amour, la mort...

Quatre ans plus tard, Pie est de retour sur scène, heureux d'être là, mais aussi toujours étonné du crédit qui lui est spontanément conservé après plus de 700 représentations dans toute la francophonie: Québec, Cotonou, Paris, Avignon, Kinshasa, etc.Etonnant, en effet, le succès de ce petit homme, parti de rien (sans formation particulière, ni prédestination aux arts de la scène) consacré «comédien» jusque sur les plateaux d'Avignon. Lui qui pensait seulement partager son expérience de réfugié politique (l'exil forcé, la confrontation avec l'Occident, le «choc» de l'arrivée en Belgique), s'est vu propulsé «amuseur public» alors qu'à y regarder de plus près, il est avant tout philosophe et décrypteur, deux fonctions qui le rapprochent plus de celle qui est la sienne au quotidien.Quatre ans après «Un fou noir au pays des Blancs», le premier étonnement et les plus grandes difficultés passés, Pie, qui a renoué avec son travail de psychologue, fait part de ses réflexions sur les préoccupations de ses «nouveaux» contemporains: amour et ruptures, jeunesse et mort, des thèmes qu'il est amené à traiter dans ses «causeries villageoises» aussi sûrement que sur les antennes d'Africa n°1. Reliant les questions des jeunes et des adultes qu'il croise avec sa propre expérience de vie, il fait à nouveau mouche.«Je ne suis pas sorcier!» n'est pas un spectacle auquel il faut assister pour s'amuser, il faut le laisser résonner en soi et s'en imprégner. A l'image de la sagesse populaire africaine qui inspire Pie dans sa démarche.

Même auprès de ses fans, Pie risque donc de faire quelques déçus, ceux qui n'auraient vu en lui qu'un comique conteur et non une «arme» philosophique. Car comme en atteste son titre, l'homme n'est pas sorcier et face aux demandes de ses contemporains, belges ou congolais, il est souvent démuni. Ne pouvant bâtir dispensaires, routes et écoles partout où le gouvernement congolais n'intervient pas, il n'a pas davantage de solutions miracle à proposer à tous les couples qui l'interpellent.

L'homme est aujourd'hui empreint de profonds doutes: ceux qui assaillent tout parent face au devenir de ses enfants et qui peuvent être rendus plus complexes par l'éloignement du cadre qui vous a vu naître et grandir. Si le mélange d'influences, de traditions et de cultures est une richesse, il peut aussi être source de débats houleux et de questions complexes, le conteur en atteste.Pourtant, pour qui saura être attentif, le bon sens, la lucidité et la tempérance ne l'ont pas quitté, graines de résolution de bien des conflits, domestiques ou élargis. Un regard perçant sur le présent et ses contradictions, voilà ce qu'est Pie, rien de plus. Et c'est déjà beaucoup.

La Libre Belgique - 14/1/2005 - Karin Tshidimba

Retour à la page précédente