Spectacle poignant à l'humour acéré où l'Histoire du XXe siècle se dessine en filigranes. En 2013, ce récit autobiographique a reçu le prix Rossel.

Alain Berenboom, l’auteur, retourne à ses racines sur les pas de son père, cet homme aux facettes contradictoires. Ce « mauvais juif » lecteur de la bible, nostalgique d’une Pologne idéalisée, rêveur de Terre Promise et de kibboutz. Ce réfugié qui aimait tant cette Belgique qui l’avait accueilli.… Ce merveilleux et indéfectible optimiste.

Décalquant l’humour de l’auteur, Christine Delmotte restitue le « Monsieur optimiste » du roman (prix Rossel 2013) avec une loyauté sans faille. Servie par deux comédiens magnifiques qui incarnent Chaïm et Rebecca en orfèvre du jeu. Ils nous relatent l’existence incroyable de ces personnes qui se sont tues, épargnant à leur fils le récit d’une histoire indicible, et espérant faire de lui, un vrai petit « belge ».


Ce roman d’Alain Berenboom m’a particulièrement touché. Dire JE est puissant, c’est une force qui permet de se dévoiler pour mieux comprendre, enfin, son humanité.

Adapter un roman à la scène est, pour moi, une aventure en soi. Entre respect de l’œuvre et découvertes de potentialités théâtrales, la route vagabonde, sinueuse, au cours du long processus de travail… Découvrir petit à petit quelles scènes nous touchent, nous interpellent, donnent du sens… Comment se servir de cette prose et de son humour si particulier… Certains passages de ce livre me procurent une émotion rare, liée à ma propre vie. Cette époque (la guerre 40-45) m’a marquée en profondeur. Les souvenirs d’autrui peuvent façonner une vie. L’histoire de mes grands-parents paternels et maternels me hante encore aujourd’hui.

Nous travaillons avec les documents retrouvés par Alain Berenboom chez ses parents : photos, lettres, écrits personnels, imprimés administratifs, objets d’autrefois. Toutes les théâtralités sont possibles, les mélanges de styles, les différents rapports au public : Le théâtre d’objets par exemple sera propice pour nous révéler certaines situations des shtetls de Pologne. Les figures de chaque membre de la famille des parents d’Alain seront mises en valeur par le théâtre d’ombres. Les ombres, entre vie et mort, entre souvenirs et oublis, disparition – réapparition, mystère et épouvante, douceur et enfance... Le travail de Christian Boltanski nous a beaucoup inspiré pour cette scénographie.

Le travail sonore est essentiel. C’est une période où la radio avait une importance énorme. Nous en tiendrons compte en entendant des extraits de ce qui se diffusait dans les chaumières. Archivés ou réinventés, nous plongerons dans cette époque avec ses jeux radiophoniques, ses animateurs, ses débats politiques. Des chants yiddish nous accompagneront régulièrement pour nous glisser dans cette ambiance si particulière.

Surtout, transmettre ces histoires à toutes et tous, quel que soit l’âge, pour ne pas les oublier.

Christine Delmotte, adaptation du roman, mise en scène et scénographie.

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