La tournée des Châteaux

« Alors du coup je lui ai dit qu'on se quittait. »
La phrase qui va changer le destin de Claire et Bruno, considérés comme un couple modèle.


La Compagnie des Galeries présente « Un petit jeu sans conséquence » pour sa tournée des châteaux. Un vaudeville moderne qui interroge le couple et l’amitié.

Pour la première fois en 32 ans, la compagnie du Théâtre des Galeries interprète une pièce contemporaine et non pas un « classique » dans sa tournée des châteaux. « Un petit jeu sans conséquence » de Jean Dell et Gérald Sibleyras – créé en 2002 au Théâtre de la Bruyère à Paris et adapté au cinéma par Bernard Rapp en 2004 – se prête à merveille à la représentation en plein air.

C’est à la ferme château d’Avernas-le-Bauduin, près de Hannut, que la troupe s’est prêtée au « petit jeu », samedi soir; une halte champêtre dans leur tournée qui se poursuit jusqu’à la fin du mois d’août.

Jeu dangereux
Une famille et quelques amis sont réunis autour d’un pique-nique pour profiter de la demeure familiale récemment vendue, figurée par la belle bâtisse. On plonge immédiatement dans l’atmosphère de cette journée à la campagne tant le décor est similaire à celui de la pièce et le temps clément. Alors que l’obscurité se fait peu à peu, Claire et Bruno, un couple sans faille, ensemble depuis douze ans, commencent à jouer un petit jeu dangereux. Claire (Delphine Ysaye en amoureuse indécise), irritée par l’image embourgeoisée et routinière de son couple, annonce au cousin gaffeur qu’elle a quitté Bruno (Pierre Pigeolet, amusant en compagnon désorienté). Le cousin (Jean-Paul Clerbois, excellent en confident indélicat) répète très vite la malheureuse nouvelle à la meilleure amie (pétillante Angélique Leleux)… En quelques minutes, l’affaire ne manque pas d’être connue de tous. Face aux réactions étranges de leurs proches qui se révèlent sous un autre jour, le couple décide de prolonger le petit jeu.

Pourtant, les convoitises des « amis » se dévoilent et chacun tente de trouver son compte dans le malheur des autres, jusqu’au copain d’enfance dragueur (Bernard d’Oultremont, très drôle) qui profite de la « disponibilité » de Claire. Manigances, complots et secrets rythment l’après-midi d’été où même le frisbee du cousin ne fait pas diversion.

Un arrière-goût acide
Bernard Lefrancq met en scène avec précision ce « petit jeu » qui dérape sans temps mort. Plein de fraîcheur, le vaudeville avec quiproquos et intrigues est servi par un tourbillon de comédiens, enchaînant les répliques justes et drôles. Non sans conséquence, la pièce interroge l’amour, la solidité, et l’influençabilité du couple tout en critiquant l’avidité des faux amis.

Un spectacle sucré comme la douce saveur d’un pique-nique estival, mais avec une pointe d’acidité.

Camille PEROTTI - La Libre Belgique, 29/07/2008

BRUXELLONS s’ouvre avec le spectacle d’« Un petit jeu sans conséquence » pour enfin faire pétiller l’été.

Oubliez le 21 juin, l’été semble avoir débuté avec l’ouverture de Bruxellons ce mardi. C’est sous un ciel enfin clément que le festival accueillait une étape de la Tournée des châteaux du Théâtre des Galeries. De quoi faire pâlir de jalousie tous ceux qui se coltinent crachins et draches depuis juin. Un parfum estival qu’on n’imputera pas seulement à la météo mais aussi à Un petit jeu sans conséquence de Jean Dell et Gérald Sibleyras, vaudeville savoureux comme un pique-nique sur l’herbe, fraises à la crème comprises.

Du théâtre en bras de chemise et canotier mais non sans un soupçon d’acidité pour qu’on s’interroge sur la fragilité du couple. Avec ce « Petit jeu » de société, la Tournée des châteaux nous propose, pour la première fois depuis 32 ans, une pièce contemporaine. Et la recette s’avère tout aussi gagnante pour l’équipe. A croire que l’humour en plein air fait partie de son ADN.

Écrin parfait avec son imposante silhouette, le château du Karreveld suggère cette demeure familiale, récemment vendue, où cousins et amis vont se retrouver pour une dernière fête. Lors de cette journée champêtre, un petit jeu secret dont les auteurs ne mesurent pas tout de suite la portée va secouer la torpeur.

Un vaudeville moderne
Claire et Bruno vivent ensemble depuis douze ans, affichant l’image d’un couple parfait. Agacée d’être comparés à ce couple d’acteurs croquant des biscottes au petit-déjeuner pour une pub télé, Claire feint, sur un coup de tête, s’être séparée de Bruno. Pour rire et, surtout, observer la réaction de leurs proches.

Un petit jeu pas tout à fait sans conséquences. La nouvelle va délier les langues, déterrer les secrets et attiser les convoitises. A l’image du frisbee censé détendre les convives, les passes amicales virent vite aux coups en traîtres et les manigances peuvent se prendre en pleine figure. Le frisbee devient boomerang, laissant certains sur le carreau.

Sans amants dans le placard ni portes qui claquent, ce vaudeville moderne vise une critique en règle des couples plan-plan et de leurs faux amis. Dirigés avec précision par Bernard Lefrancq, les comédiens font virevolter l’intrigue. Indéboulonnables piliers comiques, Pierre Pigeolet (dans le rôle de Bruno, amant attentionné mais trop mou) et Jean-Paul Clerbois (en cousin lourdaud mais hilarant) mènent la danse. Delphine Ysaye (Claire aux attentes amoureuses pas très claires), Bernard D’Oultremont (dragueur sans scrupule) et Angélique Leleux (la copine qui ramasse toujours les miettes) complètent cette chorégraphie bien huilée qui tourne pour une vingtaine de dates encore à travers la Wallonie.

Catherine MAKEREEL - Le Soir, 24/07/2008